Lucile Quero, l'engagement créatif

Graphiste et formatrice, Lucile Quero explore depuis quelques années les possibilités qu'offre une conception éco-responsable. Elle en a tiré la matière d'un ouvrage didactique et passionnant. 

 

Bonjour Lucile. Qu’est-ce qui t’a amenée vers l’écoconception ?

 

Pour la petite histoire, je n’ai pas toujours été engagée.
Au départ, je ne me renseignais pas sur l’état de la planète. J’étais plutôt admirative des défenseurs de l’écologie, mais je ne sautais pas le pas. 

 

Lors d’un voyage en Amérique latine de 3 mois, j’ai ouvert les yeux sur le monde. J’ai commencé à m’interroger sur la production et la consommation de la viande, j’ai fait des recherches, regardé des documentaires, lu des livres et j’étais ahurie par ce que je découvrais, je ne pouvais plus fermer les yeux. C’est à ce moment-là que j’ai commencé ma transition écologique. D’abord dans ma vie personnelle, en devenant végétarienne et en incluant le zéro déchet. 

 

Puis pour être alignée avec mon métier de directrice artistique, j’ai voulu l’appliquer aussi dans mon travail.

Quand je travaillais en tant que salariée, en agence de communication, je me suis rendu compte que mon métier avait un impact néfaste sur la planète. Je n’étais pas alignée avec mes valeurs et ça se ressentait dans mon travail. Je me suis donc intéressée à l’écoconception qui était plus connue chez les architectes ou designers industriels et j’ai voulu l’appliquer au graphisme. Aujourd’hui, j’adore le métier que je me suis créé, je suis passionnée par mes projets, j’adore communiquer sur l’écoconception graphique et former à ce sujet. 

 

 

Pourquoi passer par le support livre pour partager tes conseils avec le public ?

 

J’ai une formation en graphisme médias imprimés au départ, j’ai toujours préféré le papier au digital. L’édition était ma matière préférée lors de mes études. J’aime pouvoir toucher et ressentir la fibre du papier. De plus, je voulais pouvoir proposer aux lecteurs un exemple de création écoconçue qu’ils puissent avoir entre leurs mains pour illustrer mes propos.
J’aime l’idée que mon ouvrage soit non seulement une grande source de contenus, mais aussi une œuvre écoconçue en elle-même.

 

Y a-t-il des personnes qui t’inspirent dans ce domaine ?

 

Plusieurs créateurs et créatrices m’ont inspirée dans ce domaine, ils sont cités dans le livre, notamment Victor Papanek, Sylvain Boyer, Nuria Vila, Tati Guimaraes…

 

Quel est, d’après toi, le premier pas le plus facile à faire pour se lancer dans l’écoconception ?

Je pense que la première chose à faire en écoconception est d’inclure dans sa démarche des questions qui relèvent du bon sens. Avant même de se lancer dans la création et de s’interroger seulement sur l’aspect esthétique du projet, on peut y inclure de telles questions. Comment réduire l’impact de ma création sur le monde ? Quels matériaux vais-je utiliser et quelles sont les conséquences ? Qui seront les parties prenantes du projet ? Que va devenir ma création ?

 

Et ce qui est plus difficile ?

 

Le plus difficile est certainement de remettre en cause ses habitudes de créations et de changer son processus créatif. En écoconception, nous ne sommes plus seuls créatif devant notre projet, on inclut aussi toutes les parties prenantes : les fabricants des matériaux, les imprimeurs, les livreurs, les consommateurs. Ce qui est certainement le plus compliqué, car nous devons aller chercher les informations auprès de toutes ces personnes pour avoir une analyse du cycle de vie complète du projet. Toutes les étapes ne dépendent pas de nous, il faut que tous les acteurs puissent être unis, interconnectés et communiquer entre eux en toute transparence, pour avoir une création la plus écoconçue possible. C’est ce que j’appelle la démarche systémique.