Artiste de rue ayant signé fin 2019 l'ouvrage Eat me aux éditions Pyramyd, Lor-K est venue nous parler de son parcours créatif et de ses projets à venir.
Bonjour Lor-K, peux-tu nous en dire plus sur ton parcours et ton travail ?
Cela fait bientôt 10 ans que je crée des sculptures dans la rue à partir d'encombrants. Cette pratique a été fortement influencée par mon parcours scolaire. Passant d'un secteur tertiaire commercial à des études supérieures en arts plastiques, la découverte de ces deux univers m'a permis d'aborder la pratique plastique sous un nouveau jour. L'idée m'est apparue comme une évidence : utiliser les déchets dans leur contexte d'abandon, non plus seulement comme support, mais plutôt comme matière première. Aussi bien de manière esthétique qu'intellectuelle, il s'agit alors de modifier notre rapport aux rebuts par leur transformation matérielle. Sans être déplacées, les sculptures sont fabriquées et abandonnées aux mêmes endroits que les déchets qui ont permis leur construction. Le but est de mettre en lumière nos modes de consommation par les objets que nous rejetons au quotidien.
Quelle est l'histoire du livre Eat me ?
J'ai pour habitude d'archiver mes interventions urbaines : photographies, vidéos, cartographies, techniques et anecdotes sont collectées tout au long des projets. En 2016, après avoir passé 9 mois à cuisiner dans la rue, 30 recettes ont pris vie sur nos trottoirs. Le livre en est la finalité, il permet de dévoiler l'univers des actions urbaines en cristallisant tous ces instants éphémères. Comme un résultat d'expérience, le livre devient alors une oeuvre pérenne offrant des perspectives de lisibilité postérieures. Il permet aussi de démystifier l'aspect techniques des créations en partageant tout les secrets des recettes. S'appuyer sur un format existant et universel, le livre de cuisine, m'a permis d'aborder mon sujet artistique de manière ludique et populaire. Ma rencontre avec Victoria, la graphiste, est le moment déterminant qui a fait naître l'objet.
As-tu des sculptures favorites dans le projet ? Si oui, lesquelles ?
La toute première recette m'est symbolique ! Alors que l'idée de cuisiner des déchets m'est apparue dans la nuit, je découvre au réveil une chauffeuse au coin de ma rue ! Sans hésiter, je descend de chez moi, matos en main, pour mettre en forme ma vision. Après quelques temps de préparation, je suis extasiée du résultat ! C'est précisément cette recette qui m'a permis d'envisager concrètement le projet. Quelques heures plus tard, non loin, le sandwich prenait vie, la série était lancée !
Quels conseils donnerais-tu à quelqu'un qui souhaiterait se lancer dans l'art de rue ?
L'accessibilité direct à ce terrain d'action artistique est défait de tout préjugé. Il est possible de descendre en bas de chez soi pour s'exprimer, c'est certainement ce facteur qui m'a permis de dédramatiser l'action artistique ! Loin d'être une toile vierge, la rue regorge de possibilités ! Mon seul conseil serait de rester libre !
Quels sont tes projets actuels ?
Je continue de mettre en place les WORKSHOPS EAT ME, une vingtaine de recettes sont encore disponibles pour des événements. À partir du livre, les convives font re-vivre, en exemplaire unique, les sculptures qui ont fait le succès du projet. Un moment de cuisine insolite et conviviale !
En parallèle, je développe OR NOIR, un nouveau projet dégoulinant ! Les objets trouvés sont transformés en contenants laissant s'écouler un liquide noirâtre à la moindre fracture ! Le trottoir prend alors des allures de marée noire, nous forçant à constater l'impact de leur blessures dans notre environnement ! Comme à mon habitude, je filme chaque intervention. Je prépare actuellement des épisodes vidéos dévoilant les rencontres et conversations entretenues sur le trottoir. C'est pour moi une nouvelle façon de partager l'expérience vécue dans la rue !
Retrouvez Lor-K sur son site et son Instagram.
Photo principale de l'article © L'Instant Parisien