Nous avons eu la chance de nous entretenir avec Sean Adams, l’auteur du Dictionnaire de la couleur, nouveauté éclatante de la rentrée.
La couleur est une composante essentielle de toute création visuelle ; elle a donc déjà fait l’objet d’ouvrages théoriques. En quoi votre livre apporte-t-il un regard novateur sur cette question ?
Il existe effectivement de nombreux livres de qualité qui explorent les aspects théoriques et techniques de la couleur. J’en ai d’ailleurs écrit quelques uns moi-même. Mais aucun de ces ouvrages n’abordait cette question du point de vue du designer, en étendant son propos à de nombreux média. Il me semble que cet aspect est important, car il reflète la nature même du designer – quel que soit son champ d’action –, qui travaille de manière transmédiatique. Je souhaitais donc écrire un livre proposant des exemples d’utilisation d’une couleur spécifique dans tout type de design (graphique, industriel, de produit, de transport, d’intérieur…), mais également dans le cinéma, les Beaux arts, ou encore la mode.
En outre, l’une des difficultés majeures que rencontre un designer est de dépasser l’aspect fortement symbolique de chaque couleur. Un client peut aimer ou détester une couleur de manière complètement illogique, en s’appuyant seulement sur ses expériences personnelles. Le dictionnaire de la couleur procure des outils qui permettent de résoudre ces différends de manière très simple. Enfin, je trouve qu’avec l’apparition de nombreux logiciels destinés à cet effet, l’art de créer des palettes de couleur a tendance à disparaître... J’espère ainsi que les échantillons de palettes présentés dans le livre pourront inspirer les lecteurs et les encourager à lâcher leur téléphone et à contempler ce qui les entoure.
Avez-vous rencontré des difficultés pendant la conception de cet ouvrage ?
Trouver des images et en obtenir les droits est typiquement le plus gros challenge dans un livre comme celui-ci. Pourtant, pour cet ouvrage, ça a été une vraie partie de plaisir ! J’ai trouvé très stimulant le fait de partir à la recherche du travail de designers et d’artistes peu ou pas connus. L’obstacle majeur de ce livre a été de représenter les couleurs RVB (destinées aux écrans) sur le papier (pour lequel on utilise des couleurs en CMJN). Le décalage de rendu entre les deux supports a été difficile à gérer.
Si vous aviez un conseil à donner à quelqu’un qui souhaite s’initier à l’art de la couleur, que serait-il ?
Soyez audacieux ! Jouer la sûreté est une erreur monumentale. Que vous soyez un designer ou un particulier repeignant le mur de son salon, plongez la tête la première dans la couleur et embrassez toutes les possibilités. Il n’y a pas de mauvaise idée ; la seule erreur est de laisser la crainte guider votre choix. Ensuite, regardez le monde qui vous entoure. Observez réellement les couleurs d’une feuille trouvée lors d’une promenade. Une pierre apparemment grise est en fait composée d’une multitude de nuances de gris, de noir, de vert et de rouille ! Le monde est un réservoir de couleurs.
Quels sont vos projets futurs ?
Je viens tout juste de boucler The Field Guide to Supergraphics, un ouvrage de 384 pages qui recense les plus beaux graphiques environnementaux dans le monde. Je travaille également sur un livre qui traite de la notion de clarté dans le design, qui pourrait d’ailleurs vous intéresser !